Agriculture

1.

L’agriculture en Valais, une histoire millénaire et un avenir à écrire

037ph-000400 © Médiathèque Valais, Martigny, Pantaléon Binder, Fenaison vers Bramois, envion 1920

Depuis l’arrivée des premiers paysans en Valais au Néolithique, et jusqu’au début du XXe siècle, il n’y a guère de « révolution agricole ». Après sa mécanisation et son intensification, l’agriculture doit faire face, désormais, aux défis de l’avenir.

Introduction de l’agriculture en Valais
A la fin de la dernière ère glaciaire (vers 13 000 av. J.-C.), les conditions climatiques sont favorables à la sédentarisation des groupes humains. Toutefois, ce phénomène est assez tardif en Suisse : ce n’est que vers 5 500 av. J.-C. que des pasteurs-agriculteurs, venus d’Italie du Nord, installent leurs hameaux dans les environs de Sion, en amenant avec eux, à travers les cols, des techniques agricoles, mais également les premiers troupeaux d’élevage. À leur contact, les chasseurs-cueilleurs transforment progressivement leur mode de vie et deviennent sédentaires. C’est la « révolution néolithique » *.

Installation de l’agriculture de subsistance *
La population valaisanne a longtemps vécu d’une agriculture vivrière * et itinérante. L’essentiel de l’activité agricole se situe dans les vallées latérales. Étant donné que les sols sont assez pauvres en moyenne altitude, les terres s’épuisent rapidement. Les habitant∙e∙s doivent alors se déplacer périodiquement, au gré des saisons. L’objectif des paysan∙ne∙s est de subir les aléas de l’hiver le moins durement possible : retranché∙e∙s durant l’hiver dans leurs habitations, souvent à proximité de leur bétail, ils / elles attendent avec impatience l’arrivée du printemps pour pouvoir sortir sur les pâturages d’abord puis, progressivement, vers les mayens et enfin sur les alpages d’altitude. Les humains sont donc soumis aux aléas de la météo et il n’est pas rare que, suite à de mauvaises récoltes, la population valaisanne endure des épisodes de famine.

009ph-00095 © Médiathèque Valais, Martigny, Joseph Sterren, travaux des champs, Ergisch, entre 1910 et 1930
037ph-000400 © Médiathèque Valais, Martigny, Pantaléon Binder, Fenaison vers Bramois, envion 1920

Le Rhône et ses aléas ne permettent pas une agriculture optimale et pérenne en plaine ; crues et inondations des zones de pâturages ou de culture, cours changeant créant de nombreuses « tresses » évolutives et zones marécageuses posent un certain nombre de problèmes et poussent l’agriculture dans les vallées latérales, sur les coteaux. Dès le XIIIe siècle, des changements climatiques importants suscitent le développement des bisses, même s’ils existaient déjà probablement avant (les origines sont controversées mais pourraient remonter aux populations primitives). Ces bisses sont les témoins d’une volonté d’intensifier l’agriculture en canalisant l’eau, permettant d’irriguer non seulement les cultures mais aussi les pâturages pour permettre un élevage plus important. Une première tentative de correction du Rhône, dès 1863, grâce au soutien de la Confédération, montre la volonté de le canaliser pour améliorer les conditions agricoles et les potentialités de vie en plaine ; même si elle n’est pas optimale, elle permet d’assainir la plaine, d’augmenter les surfaces cultivables et de développer de nouvelles cultures (arbres fruitiers, céréales…). Cela signe aussi le début d’une relation tout à fait différente entre les humains et le Rhône. Les Valaisan∙ne∙s chercheront dorénavant constamment à neutraliser ses dangers et exploiter ses potentialités, pour intensifier l’activité humaine.

L’ère de l’agriculture intensive
La mise en place de nouveaux modes de production est facilitée par la 2e correction du Rhône, dès 1936 ; avec la conquête de nouvelles terres fertiles et accessibles, et une sécurisation augmentée. Ce mode de production répond également à la volonté d’auto-suffisance alimentaire de la Suisse dans le contexte historique de l’entre-deux guerres mondiales.
À cette époque, le Valais passe de la « Camargue » — zone marécageuse et peu propice au développement économique à la « Californie » — symbole de l’essor économique et social des Trente Glorieuses * (Bender, 2004). Cette vision, un peu réductrice, montre l’ambition des Valaisan∙ne∙s de développer une agriculture moderne plus productive.
Le Valais voit ainsi l’agriculture de subsistance être rapidement remplacée par des exploitations professionnelles mécanisées et une agriculture commerciale (viticulture, arboriculture).
Cependant, la relation qui lie les habitant∙e∙s du Valais au milieu naturel reste conflictuelle : « Ici l’Eden a été gagné sur la friche par le travail… » .
Ces nouvelles pratiques ne sont cependant pas sans conséquence. L’intensification de l’activité agricole a recours à des outils mécaniques et des produits phytosanitaires (engrais chimiques, herbicides, fongicides…) qui améliorent le rendement et la productivité de ces terres mais appauvrissent la biodiversité, et la santé des sols et des eaux.

Laurence Piaget-Dubuis, établissement horticole, Fully 2022

L’agriculture de demain, une équation encore à résoudre
De nos jours, les consommateur∙ice∙s se questionnent sur les modes de production durable ; bio, local, de saison, équité des revenus pour les travailleurs, qualité / prix… Cela amène un changement de paradigme * dans le métier : les agriculteur∙ice∙s incluent désormais dans leurs fonctions la protection et l’entretien des paysages, de l’environnement et de la biodiversité. On voit également se développer l’agrotourisme, qui participe au développement économique de la région, mais aussi, dans une certaine mesure, une sensibilisation des enjeux agricoles et une meilleure visibilité de ces activités. Cette évolution des rapports de l’humain vis-à-vis de ses ressources et de leur exploitation est visible dans les enjeux de la 3e correction du Rhône. Aujourd’hui, s’il est nécessaire de sécuriser toujours mieux l’humain et ses activités, et d’optimiser l’utilisation du territoire de plaine pour la prospérité économique, nous ne pouvons pas oublier les questions écologiques, autour de la préservation et de la re-densification de la biodiversité.
La question du rapport des besoins humains face aux enjeux de durabilité écologique, l’impact du climat et de l’environnement naturel, et à l’inverse, l’impact humain sur ceux-ci, sont au cœur des défis agricoles pour l’avenir.

Pour aller plus loin
→ « Ici l’Eden a été gagné sur la friche par le travail… ». Explique le sens de cette phrase avec tes mots.
→ Penses-tu que le Valais est réputé pour son agriculture ? Quel en serait le symbole ?

Mots clés
Révolution néolithique, alpages, vergers, viticulture

Fiche PDF imprimable à télécharger
1. Agriculture, L’agriculture en Valais, une histoire millénaire et un avenir à écrire

Bibliographie
Bender Gabriel, Corriger le Rhône et les Valaisans : trois siècles de travaux et de débats, Revue de géographie alpine, tome 92, n°3, Mélanges, 2004, pp. 51-61
Bernard Truffer ; Philippe Curdy ; François Wiblé ; Gilbert Coutaz ; Gregor Zenhäusern ; Gregor Zenhäusern ; Marie-Claude Schöpfer Pfaffen ; Louiselle Gally-de Riedmatten ; Gaëtan Cassina ; Gaëtan Cassina ; Silvia Arlettaz ; Myriam Evéquoz-Dayen ; Myriam Evéquoz-Dayen ; Simon Roth ; Valais, Dictionnaire historique de la Suisse ( DHS ), version du 04.04.2022, traduit de l’allemand, https://hls-dhs-dss.ch/fr/articles/007396/2022-04-04/
https://www.vs.ch/web/rhone/accueil

Crédits
1. 037ph-000400 © Médiathèque Valais, Martigny, Pantaléon Binder, Fenaison vers Bramois, envion 1920
2. Laurence Piaget-Dubuis, établissement horticole, Fully 2022
3. 009ph-00095 © Médiathèque Valais, Martigny, Joseph Sterren, travaux des champs, Ergisch, entre 1910 et 1930

Articles recommandés